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coordonnée. Sa vie était concentrée dans ses regards. La bouche mi-ouverte, elle semblait boire les paroles de sa nièce, avidement, comme un cordial. Et elle insistait pour que celle-ci lui contât tout, mais tout. Venancinha se laissait aller aux confidences. La tante avait l’air si jeune, ses exhortations étaient si tendres, si pleines d’un pardon anticipé, que Venancinha éprouvait pour elle la confiance qu’inspire une amie, malgré certaines phrases sévères qui se mêlaient aux autres, et n’étaient que le reflet d’une inconsciente hypocrisie : je ne dirai pas d’un calcul, car dona Paula se leurrait elle-même. Elle ressemblait à un général invalide qui s’efforce de retrouver un peu de sa juvénile ardeur aux récits d’autres campagnes.

— Tu vois bien que ton mari avait raison, disait-elle. Quelle imprudence ! tu as été bien imprudente.

Venancinha confessa que oui, mais jura que c’était bien fini.

— J’ai peur que non. Car enfin, tu l’as aimé.

— Ma tante !..

— Et tu l’aimes encore !

— Non : je le jure. Mais que je l’aie aimé : ça,