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vert ma fugue, m’avait administré de ses mains une verte raclée avec des verges de cognassier. Les raclées de papa restaient gravées dans ma mémoire. C’était un vieil employé de l’arsenal, raide et intolérant. Il rêvait pour moi une haute position dans le commerce et avait hâte de me voir derrière un comptoir. Il attendait seulement que je susse lire, écrire et compter, et que je connusse quelques éléments de comptabilité. Il me citait des noms d’hommes fort riches, qui avaient commencé de la sorte. Or donc, ce fut le souvenir de la dernière punition qui, ce matin-là, me poussa vers le collège. Je ne brillais point par la sagesse.

Je gravis l’escalier avec précaution pour ne pas attirer l’attention du maître, et je me faufilai à temps. Il entra dans la classe deux ou trois minutes plus tard. Sa démarche était silencieuse ; il portait des pantoufles en cuir de Cordoue, une lévite de coutil déteinte aux lavages, un pantalon blanc raidi d’empois et un grand col rabattu. Il s’appelait Polycarpe, et avait cinquante ans ou plus. Il s’assit, tira de sa poche un grand mouchoir rouge et une tabatière, et mit le tout dans son tiroir. Ensuite,