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ambitionnait de trouver une fiancée supérieure à lui-même et à la société dans laquelle il vivait, et il avait perdu son temps à l’attendre. Il fréquenta les bals d’un avocat célèbre et riche, pour lequel il faisait de la copie, et qui le protégeait. Il avait dans le monde la même position subalterne qu’au bureau. Il passait la nuit à errer dans les corridors, épiant ce qui se passait dans le salon, regardant passer les dames, dévorant des regards une multitude d’épaules magnifiques et de tailles gracieuses. Il enviait les hommes et les imitait. Il sortait de là enthousiaste et résolu. Quand il n’y avait point de bals, il allait aux fêtes religieuses, où il pouvait rencontrer quelques-unes des jeunes filles les plus en vue. On était certain de le trouver dans l’allée du palais impérial, les jours de gala ; il assistait au défilé des grandes dames et des personnages de la cour, ministres, généraux, diplomates, conseillers. Il était au fait de tout, il connaissait tout le monde, il énumérait tous les équipages. Il revenait de la fête et du cortège comme il revenait des bals, impétueux, ardent, capable d’enlever à la pointe de sa lance la palme de la fortune.