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Chose étrange, cet observateur, qui conservait si bien le souvenir des états d’âme entrevus au delà des physionomies, des poses et des attitudes, était frappé d’une sorte d’aveuglement devant les paysages qui s’offraient à sa vue. Il vivait au Cosme Velho, dans un de ces recoins d’ombre odorante, où la magnificence de la végétation tropicale atteint à l’apogée. Le jour, la vue se repose sur les frondaisons durables et denses ; dans le silence du soir, sous le rayonnement pâle des nuits lumineuses où l’on distingue mal les étoiles filantes du vol des mouches phosphorescentes qui transforment les recoins obscurs en autant de firmaments mouvants, la voix de la forêt au feuillage d’argent, où la vie bruit de mille manières, où la musique de l’ombre se marie à la clarté des cieux, emporte l’âme dans un vol de beauté vers d’ineffables extases panthéistiques. Aucun de ces aspects n’a jamais distrait Machado de Assis