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En arrivant, je recueillis sur le colonel les pires renseignements. C’était un homme insupportable, toqué, exigeant, que personne, même ses propres amis, ne pouvait endurer. Il changeait plus souvent d’infirmier qu’il n’usait de remèdes. Il avait cassé la figure à deux de mes prédécesseurs. Je répondis que je ne craignais pas les gens en bonne santé, et bien moins encore les malades ; et après m’être concerté avec le vicaire, qui me confirma tout ce que l’on m’avait dit, et me prêcha la mansuétude et la charité, j’entrai dans la maison du colonel.

Je le trouvai sous la véranda, étendu sur une chaise, geignant et de mauvaise humeur. Il ne me reçut pas trop mal tout d’abord, et m’examina en silence, dardant sur moi des regards de chat à l’affût.

Un sourire méchant illumina ses traits, qui étaient durs. Ensuite il me dit qu’aucun des précédents infirmiers ne valait la corde pour le pendre ; que c’étaient tous des endormis, des raisonneurs, passant leur temps aux trousses des servantes. Deux étaient des voleurs.

— Et vous, êtes-vous voleur ?