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naire beauté. En cela, ils se montrèrent enthousiastes et sincères.

— Oui ! Je me souviens encore !… elle était fort jolie.

— Le jour suivant, en arrivant au bureau, dans l’attente de causes qui ne venaient pas, je racontai à Nobrega la conversation de la veille. Nobrega rit d’abord, devint pensif, et, après avoir fait quelques pas, il s’arrêta devant moi, fixe et muet : « Je parie que tu en es amoureux ? » lui demandai-je.

— Non, me répondit-il ; toi non plus ? Eh bien ! J’ai une idée : Allons tenter l’assaut de la forteresse ? Que perdons-nous ? Rien : ou elle nous mettra à la porte, comme nous pouvons nous y attendre, ou elle acceptera l’un de nous, et tant mieux pour l’autre qui verra la félicité de son ami…

— Parles-tu sérieusement ?

— Très sérieusement. Nobrega ajouta que ce n’était pas seulement sa beauté qui la rendait attrayante. Notez qu’il avait la présomption d’être un esprit pratique, mais qu’il était surtout un visionnaire qui passait sa vie à lire, et à édifier des systèmes politiques et sociaux. À son