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Non seulement le ministère lui paraissait excellent, ce qui pouvait d’ailleurs ne pas être mon opinion, mais, qui plus est, il avait toutes les chances de durer longtemps. Que pouvais-je bien gagner en me vouant à l’ostracisme ? Quelques-uns des ministres me voulaient du bien. Il n’était pas impossible qu’à la première vacance…

Je l’interrompis pour lui dire que j’avais beaucoup médité avant de prendre une décision et que je ne reculerais pas d’une semelle. Je lui offris de lui lire mon programme, mais il se refusa énergiquement à l’entendre, en disant qu’il ne voulait aucunement prendre part à mon extravagance.

— Car c’en est une, vraiment ; prenez le temps de la réflexion, et vous verrez si je n’ai pas raison.

Sabine vint à la rescousse, le soir, au théâtre. Elle laissa son mari et sa fille dans la loge, me prit le bras, et m’entraîna dans le corridor.

— Mon petit Braz, qu’est-que tu vas faire ? me demanda-t-elle avec une visible tristesse. Quelle idée de provoquer le Gouvernement, sans nécessité, quand tu pourrais…