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— Veux-tu bien te taire ! lui dis-je en le menaçant du doigt.

Je confesse que ce dialogue était fort indiscret, principalement en ce qui concerne ma réponse. Et je le confesse avec d’autant plus de plaisir que les femmes ont la réputation d’être indiscrètes, et je ne voudrais pas terminer ce livre sans rectifier cette injuste notion de l’esprit humain. En matière d’aventures amoureuses, j’ai trouvé des hommes qui souriaient ou niaient maladroitement d’une façon évasive et monosyllabique, tandis que leurs complices auraient juré sur les Saints Évangiles qu’on les calomniait. La raison de cette différence, c’est que la femme, à part l’hypothèse du chapitre ci, et dans quelques autres cas, se livre par amour, qu’il s’agisse de l’amour-passion de Stendhal ou de l’amour purement physique de quelques dames romaines, voire même polynésiennes, lapones, cafres, ou de n’importe quelle autre race civilisée. Mais l’homme, je parle de l’homme d’une société cultivée et élégante, l’homme unit toujours sa vanité à l’autre sentiment. De plus (et je me réfère toujours aux cas prohibés), la femme, quand elle aime un