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frotte sur son genou, les lave à grande eau, et n’arrive point à trouver la sottise.

C’est un bibliomane. Il ignore l’auteur ; ce nom de Braz Cubas, il l’a en vain cherché dans les dictionnaires biographiques. Il a trouvé le volume, par hasard, sur l’étagère d’un bouquiniste, et l’a eu pour deux cents reis. Après mille et mille recherches, il s’est convaincu qu’il s’agit d’un exemplaire unique… Unique ! Ô vous qui non seulement aimez les livres, mais encore avez la passion du collectionneur, vous connaissez bien la valeur de ce mot, et vous devinez par conséquent la joie de notre bibliophile. Il eût refusé la couronne des Indes, la papauté, tous les musées d’Italie et de Hollande si on lui eût offert de les échanger contre cet unique exemplaire. ’ailleurs, si au lieu de mes Mémoires, c’eût été un almanach, il aurait agi de la même manière, pourvu que l’exemplaire fût unique.

Pourtant il y a une absurdité. Notre homme demeure penché sur la page, une loupe collée à l’œil droit, tout à l’idée de trouver l’erreur. Il s’est promis d’écrire un mémoire succinct, où il relaterait, avec la découverte du livre, celle