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à cette heure, ô grand fondé de pouvoir des affaires humaines ? Peut-être as-tu fait peau neuve, peut-être as-tu pris une autre physionomie, d’autres manières, un autre nom, et il n’est pas impossible que… Mais où en étais-je ? ah ! dans les routes ignorées. Je me dis donc qu’il en serait comme il plairait au ciel. Notre sort, à nous, était de nous aimer. Sinon, comment expliquer la valse et le reste ? Virgilia pensait de la même façon. Un jour, elle me confessa qu’elle avait parfois des remords. Je lui répondis qu’en ce cas, elle ne m’aimait pas. Aussitôt elle m’enlaça de ses bras magnifiques en murmurant :

— Je t’aime, c’est la volonté du ciel.

Et ces paroles n’étaient pas vaines. Virgilia était quelque peu croyante. Elle n’allait pas à la messe le dimanche, c’est vrai, je crois même qu’elle n’y allait que les jours de grandes solennités, et quand il y avait une place de libre dans les tribunes. Mais elle priait tous les soirs avec ferveur, ou tout au moins avec envie de dormir. Elle avait peur du tonnerre. Elle se bouchait alors les oreilles, et marmottait toutes les oraisons du catéchisme. Dans sa chambre à cou-