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glée, adieu ! Je prends le chemin ardu de la gloire ; je vous abandonne avec mes culottes d’enfant.

Et ce fut ainsi que je débarquai à Lisbonne, et que je partis pour Coimbra. L’Université m’attendait avec ses sciences arides ; je fus un étudiant médiocre, ce qui ne m’empêcha point de devenir bachelier. Je reçus mon diplôme avec toute la solennité d’usage, quand j’eus terminé mon cours. Ce fut une belle fête qui me remplit d’orgueil et de regrets, de regrets surtout. J’avais acquis à Coimbra une grande réputation de bon vivant. J’étais un étudiant léger, superficiel, tumultueux et pétulant, aimant les aventures, faisant du romantisme pratique et du libéralisme théorique, vivant sur la foi des yeux noirs et des constitutions écrites. Le jour où l’Université m’attesta sur parchemin que j’étais un savant, moi qui n’ignorais pas les lacunes de mes connaissances, je me sentis en quelque façon déçu, sans rien perdre de mon orgueil pour cela. Et je m’explique. Le diplôme était un titre d’affranchissement. Mais s’il me donnait la liberté, il m’imposait aussi la responsabilité. Je gardai le titre, je laissai les