Page:Mac Orlan - Le Chant de l’équipage.djvu/221

Cette page a été validée par deux contributeurs.
213
LES MAÎTRES DE L’ILE

réveilla pas. Alors Krühl et Peter Lâffe prirent le fumeur d’opium, l’un par les pieds, l’autre par la tête, et le transportèrent dehors, en pleine lumière, devant la porte de la caverne.

― En voilà un autre, dit Krühl, en déposant son fardeau sur le sol.

― De plus en plus joli, répondit Eliasar. C’est un Chinois ou un Annamite. Je me demande quel était le but de l’opération chirurgicale qui l’a privé de son nez et de ses oreilles ?

― Je ne comprends pas, déclara Krühl en regardant Heresa dont l’anxiété se dissimulait mal. Puis il ajouta après une hésitation : « Je vais rentrer de nouveau dans la grotte. Il ne reste plus rien, mais par acquit de conscience… »

Il disparut dans le trou noir avec Peter Lâffe sur ses talons.

Heresa jeta un regard autour de lui et aperçut Conrad qui, à quelques centaines de mètres, fouillait les buissons avec sa canne. Il se tourna alors vers Eliasar : « Dites donc, mon pétit, il faut vous dépêcher dé terminer votre affaire et puis nous partirons tout dé suite. Nous n’avons pas d’intérêt à séjourner longtemps ici. Jé vous dis franchement qué jé n’aime pas cé pétit coin, oh ! mais pas du tout. Qué la Purissime nous protège ! »

Eliasar paraissait un peu désemparé. « Oui, murmura-t-il, je vais liquider. À la première occasion, j’agirai. Quand je laisserai tomber