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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

tesques se tordaient de même que d’énormes serpents à la peau crevassée. Les trois matelots, peu habitués à la marche, sentaient la fatigue raidir les muscles de leurs cuisses et de leurs mollets.

― Hé, monsieur Krühl ! cria le capitaine Heresa.

Krühl se retourna brusquement :

― Quoi ! quoi ! Qu’est-ce qu’il y a ?

― Il serait peut-être plus prudent de rentrer. La nuit va nous prendre ici dans cette sale forêt.

― Ah oui, oui.

― Oui, rentrons, approuva Eliasar.

On fit demi-tour. Heresa marchait à côté de Krühl. Petit à petit il le laissa prendre un peu d’avance et s’approcha d’Eliasar qui suivait à quelques mètres en avant du groupe des matelots.

― Faut-il vous lâcher ? Êtes-vous prêt ?

― Attendez à demain.

― Soit.

Heresa et Samuel Eliasar rejoignirent Krühl. Le capitaine prit sa boussole. Il indiqua du doigt une direction à suivre.

― Voilà la région des hautes herbes, annonça-t-il presque joyeusement.

La nuit commençait à tomber quand on rejoignit le canot où Rafaelito sommeillait béatement.

Krühl ne put réprimer un rapide frisson d’allégresse et de bien-être en embarquant dans le youyou.