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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

donne ma parole que nous ne tarderons pas à naviguer à notre compte.

― C’est qué nous nous sommes considérablement éloignés de la mer des Antilles. En cé moment nous dérivons dans une direction qui né mé paraît pas très fournie en îles désertes.

Une heure plus tard, Perez signala la terre à tribord. Heresa, Gornedouin, Eliasar et Krühl fouillèrent la direction indiquée avec leurs jumelles.

― C’est, en effet, la terre, dit Krühl.

Le capitaine Heresa sans mot dire fit son estime. Le résultat de son calcul fut qu’il se mordit la lèvre inférieure en se frottant les mains.

― Ne serait-ce pas l’île ? interrogea Eliasar, manifestant ainsi son intention formelle de donner une suite aux désirs qu’il venait d’exprimer.

― Jé né sais pas cé qué c’est, murmura Heresa contre son oreille.

― Serait-ce notre île ? demanda Krühl.

― J’en ai la conviction, fit Heresa, à tout hasard.

La brise, en effet, portait à terre et bientôt l’Ange-du-Nord fut assez près des côtes pour qu’on pût en distinguer le détail.

Une grande effervescence régnait à bord, Krühl, plus ému qu’il ne voulait le laisser paraître, ne tenait pas en place. Chita, soumise, accroupie à ses côtés dans son attitude familière, se laissait flatter de la main.