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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

et lui donna ironiquement le conseil de s’occuper de ses médicaments.

― Il finirait par nous tuer tous, ajouta-t-il en riant.

Krühl sur le moment prêta peu d’attention à cet accident, mais il prit l’habitude prudente de lever la tête avant de s’engager sur le pont.

― Nous ne réussirons pas de cette façon, dit le capitaine à Samuel Eliasar quand ils furent seuls.

― Alors, découvrez l’île inconnue le plus vite possible. J’ai hâte d’en avoir terminé.

Depuis l’histoire de la hachette, Krühl se montrait nerveux et vaguement inquiet. Ce n’était pas de la méfiance, mais plutôt une sorte de malaise qu’il ne parvenait pas à définir lui-même. Il attribua tout d’abord cette inquiétude qui l’enveloppait avec insistance au mauvais fonctionnement de son estomac.

― Vous buvez trop, lui dit Samuel. Il faut adopter un régime : suppression du vin, de l’alcool sous toutes ses formes, suppression de la viande. Je vous permets un peu de pigeon bouilli avec une carotte dans une petite casserole.

Krühl suivit le régime pendant deux jours et n’eut pas le courage de résister à la tentation d’une bouteille de Bourgogne qu’il but avec Conchita.

La novia s’émancipait. Un soir, en pleine mer, elle dansa au son du fameux accordéon.