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CHITA

Pourtant peu à peu l’équipage s’habitua à la présence de la jolie fille. Elle lavait son linge sur le pont, s’étirait au soleil, ou dormait assise sur ses talons, aux pieds du Hollandais.

― Chita ! À l’appel de son nom elle levait vers Krühl ses grands yeux caressants et soumis. Elle riait. Krühl la flattait en tapotant ses joues dorées du revers de sa main.

Parfois Heresa daignait adresser la parole à Chita en espagnol ! Krühl ne comprenait pas. Mais la fille comprenait. Elle regardait Heresa avec intelligence et ne répondait jamais.

― Quand nous débarrassera-t-il de cette pouffiasse ? grommelait Eliasar qui n’appréciait pas le charme sauvage de l’aventurière.

― Elle ne restera pas ici longtemps quand il né séra plus là, déclarait le capitaine.

Un soir que Krühl errait sur le pont avant d’aller se mettre au lit, comme il passait près du mât de misaine, une hachette tomba à ses pieds d’assez haut pour que le tranchant s’enfonçât profondément dans le plancher du pont de deux ou trois centimètres.

Krühl recula brusquement, il leva le nez en l’air, aperçut Eliasar à cheval sur une vergue.

― Que faites-vous donc là-haut ? Vous avez failli me tuer. Faites attention, nom de Dieu !

Eliasar se hâta de descendre et trouva d’assez piètres excuses pour expliquer sa présence dans la mâture. Heresa le plaisanta sur sa maladresse