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XII

L’ÉQUIPAGE DE FORTUNE


Il n’est pas nécessaire de recopier en détail les observations consignées sur le livre de bord du capitaine Heresa. De Santander à Santa-Cruz, dans la grande Canarie, l’Ange-du-Nord, son équipage et ses passagers se comportèrent décemment, à la satisfaction de Krühl et du capitaine.

Le temps s’était lui-même transformé. Un soleil encourageant brillait dans un ciel sans nuage où sa lumière se fondait paisiblement.

Laissant Madère à sa droite, l’Ange-du-Nord, toutes voiles dehors, poursuivait sa route, dans un effort élégant et presque insensible.

M. Krühl, Samuel Eliasar, le capitaine Heresa et le second fumaient à l’arrière, se laissant aller au bien-être de cette belle journée caressante. C’était dimanche. Bébé-Salé avait amené son accordéon avec lui sur le pont. Assis sur une pile de cordages, appuyé contre le grand mât, il jouait des airs plaintifs de la Bretagne.

Il chantait de cette voix de tête inimitable et