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« Qu’est-ce qu’on verra ? On verra… la pièce est bien dans le journal ?… personne ne dit le contraire ?… on verra… la pièce passer sous le chapeau ! »

Cependant la foule s’amassait, et très intrigué je me disais : « Il a beau être malin, je verrai bien comment il s’y prend ! »

Pour rien au monde je n’aurais levé les yeux dans ce moment-là.

L’homme à la pièce reprit :

« Oui, sous le chapeau !… Rentrez un peu, mademoiselle, vous n’en verrez que mieux. Ah ! on vous pousse… Ne poussez donc pas cette demoiselle !

« Oui, sous le chapeau !… la pièce est encore dans le journal… attention ! je lève le chapeau !

« Elle n’y est pas !

« Non, elle n’y est pas, et je ne veux pas vous amuser plus longtemps avec des bagatelles indignes de vous… Voici une montre, une chaîne et une alliance… cet article se vend partout quarante francs… mais ici, ce n’est pas quarante francs, c’est un franc ! Un franc, dites-vous ? Je comprends votre étonnement. Eh bien, non, ce n’est pas un franc, ni même quinze sous, ni même dix, ni même… »

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

À ces mots, je tournai les talons, et, furieux, je m’éloignai de l’infâme camelot en pensant que cet animal-là m’avait fait manquer le premier acte de Ruy Blas !