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EN BELLE HUMEUR

velle, il ne craignoit plus rien d’ailleurs, et il se fioit si fort à son ami, qu’il ne croyoit pas qu’un Abbé jeune et bien fait fut capable d’en conter à une belle Dame, au préjudice d’un Epoux, dont l’age devoit lui inspirer du respect mais il se trompa bien dans son calcul. L’Abbé Leonardin étoit de ces jeunes gens polis, qui n’ont d’autre occupation que de passer les jours et les nuits à découvrir parmi le beau sexe des sujets pour se dédommager aux dépens des pauvres maris, de la sévére loi, qui leur ordonne un célibat éternel. Il connoissoit Ormon depuis long-temps. Ils s’étoient toujours vus avec beaucoup d’estime de part et d’autre, et encore plus particuliérement qu’auparavant, depuis qu’il avoit épousé Aminte, car l’Abbé la trouvant à son goût, et jugeant par le grand age d’Ormon qu’elle étoit mal servie, avoit tenté bien des fois à se faire aimer, à quoi il eût bien de la peine à réüssir. Le Secretaire étoit un obstacle insurmontable : un Amant chéri et favorisé détruit bien les desseins du Rival ; mais la perséverance d’un Abbé, et l’inconstance