Page:Macé - L’Abbé en belle humeur, 1881.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
EN BELLE HUMEUR

rent, ils s’exposoient à être pris sur le fait, par une indiscrétion dont ils n’étoient pas les maîtres. Ce manége dura quelques années sans aucun trouble, et jamais trois personnes ne furent plus contentes d’elles-mêmes. Souvent, néanmoins, Ormon tomboit dans une réverie profonde, qui n’inquiétoit pas peu sa belle Epouse. La crainte qu’elle avoit que son intrigue secrette avec Nico ne se découvrit, lui faisoit passer de fâcheux momens, et particuliérement lors qu’elle voyoit son Epoux pénétré de cette mélancolie dont il se faisoit une habitude depuis quelque tems. Un jour qu’il étoit encore plus pensif que de coûtume, cette Belle, plus en peine que jamais, voulut à quelque prix que ce fût découvrir le sujet de cette mauvaise humeur. Etant l’un et l’autre enfermés, et assis près du feu dans la chambre d’Aminte, Ormon prenant un écran à la main, et le coude appuyé sur une table, se mit à réver si profondément, qu’il fût plus d’une grosse heure en cette posture, sans proferer une seule parole, ayant les yeux fixés sur cet écran, comme si ç’eut