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EN BELLE HUMEUR

graciée de la fortune, et par la naissance et par les biens, mais qui, par une beauté si extraordinaire et capable d’enchanter tous les hommes, si elle eût été accompagnée d’une vertu sévére et d’une conduite réglée, étoit capable de faire par sa possession les délices d’un Roi.

Qui choisit prend le pire, dit un ancien proverbe. Mais pour la justification d’Ormon, nous pouvons aussi dire à son avantage qu’il y a une certaine destinée dans les mariages dont nous ne sommes pas les maîtres, et que nous ne pouvons fuir ; cela ne se trouva que trop vrai dans cette occasion, car il préféra aveuglément cette jeune beauté à tout ce qu’il avoit vû, et s’en entêta d’une maniére à vouloir se contenter.

Un vieux Médecin des amis d’Ormon, auquel il avoit confié son dessein comme aux autres pour le mariage, avoit sçû si bien le ménager, qu’adroitement il l’attira chez lui, où bien loin de le porter par de sages conseils à s’ôter de l’esprit une pareille pensée, si dangereuse pour le front d’un homme de son âge, l’y fortifia, et lui applaudit