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liée du Théétète 1 et même les récentes observations de l'Ecole anglaise, Aristote est amené à reconnaître la subjectivité et l'objectivité parallèles du sensible et de la sensation, la continuité de l'agent et du patient à travers l'unification de leurs modes en une énergie commune., en un mot la connexion et la distinction des deux mondes, du monde des phénomènes et du monde des images. Ce système n'allait pourtant point sans difficultés. La première conséquence en était que l'objet senti pénètre dans l'esprit par sa forme seulement, forme sans matière, pour la réception de laquelle se trouvent disposés les organes, et qui était devenue chez les scolastiques Yespèce sensible (species sensibilis).

Mais quel est le rapport de l'espèce sensible avec la sensation d'une part et avec l'objet de l'autre? Yoilà ce qu'Àristote n'avait point suffisamment éclairci et ce que le moyen âge fut conduit à rechercher.

Les averroïstes, toujours en quête de surnaturel, ne tardèrent pas à résoudre le problème par l'intervention d'un sens agent dont l'office était de faire passer le sens passif de la puissance à l'acte, en lui imposant la forme de l'espèce sensible. Cet agent, les uns le conçurent comme une faculté intérieure à l'âme, les autres comme une puissance séparée, analogue à l'intellect : tous s'accordèrent à le distinguer de la simple réceptivité.

Saint Thomas et Pomponace après lui avaient objecté à cette théorie que le sens est particulier, tandis que l'intellect est universel, et que, fut-il démontré qu'il est besoin d'une énergie spéciale et distincte pour transformer les images en intelligibles, on n'aurait pas le droit d'en conclure la nécessité d'une énergie analogue pour le sens. I. Voir à ce sujel la Philosophie de Platon de M. Alfred Fouillée, t. II. p. 138.