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puler les débris des provisions chargées sur le traîneau. Puis, mis en goût par le régal inattendu, ils avaient repris leur poursuite.

Et au moment où l’escouade de secours venait de rejoindre les pauvres émigrants du cap Washington, ceux-ci voyaient déjà surgir l’avant-garde de leurs ennemis.

« Ils sont au moins vingt ! » s’écria le maître Guilvinec, qui commandait le détachement depuis la mort de Rémois.

Heureusement la distance à franchir désormais pour regagner le steamer n’était point excessive. Le lieutenant Hardy, qui commandait l’escouade de secours, donna l’ordre de-laisser prendre les devants au traîneau et à ceux qui l’escortaient, tandis que lui-même et ses cinq compagnons couvriraient la retraite.

Et, ne résistant pas à la tentation de tirer un beau coup de fusil, il attendit de pied ferme que l’une des bêtes fût à portée de son arme, pour lui envoyer, le plus civilement du monde, une balle à pointe d’acier.

Il eut la joie et l’orgueil de constater que le coup avait porté.

L’ours, atteint au défaut de l’épaule, tomba foudroyé. Il avait eu le cœur traversé par le projectile. Malgré la gravité de la situation, ses hommes ne purent se défendre d’admirer avec enthousiasme ce magnifique résultat.

« Bravo, capitaine ! » criaient-ils, en soulevant leurs bonnets de fourrure.

Mais cet exploit cynégétique ne fut rien moins qu’utile, bien loin de là.

Les animaux affamés accoururent en grondant, et s’empressèrent de se partager les dépouilles de leur congénère