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Les marins n’avaient dû qu’à cette circonstance de n’être point attaqués pendant les ténèbres.

Mais, au lever du soleil, leurs terreurs s’étaient converties en une épouvante sans mesure.

Ce n’était plus trois ours, c’était douze qu’ils avaient autour d’eux, douze ours, un par homme !

Dans de telles conditions le péril devenait extrême, et si les infortunés voyageurs ne franchissaient point dans leur journée les 70 kilomètres qui les séparaient de l’Étoile Polaire, ils n’étaient que trop sûrs d’avoir à subir un assaut au cours de la nuit qui allait venir.

L’imminence du péril leur avait donné des ailes. Ils avaient fait des efforts surhumains.

Mais les bêtes affamées, comprenant sans doute que leur proie allait échapper, s’étaient rapprochées peu à peu, et le moment était venu où ils s’étaient formés en ligne d’attaque, à moins de 500 mètres des fuyards.

Ceux-ci avaient cependant franchi les deux tiers de leur étape et pouvaient espérer atteindre sans trop d’encombre le navire sauveur, quand, brusquement, une bande nouvelle était apparue.

Alors on avait pris un parti héroïque.

Dételant l’un des deux traîneaux, on l’avait laissé en arrière, en prenant soin de découvrir tout ce qui pouvait être dévoré. Les chiens étaient venus s’ajouter au premier équipage. On l’avait surchargé des hommes les plus épuisés par la fatigue de cette marche forcée, et l’on avait littéralement couru sur le pack.

Mais ce n’avait été là qu’un répit momentané. Les assaillants avaient eu tôt fait de mettre en pièces et de se dis-