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Les douze hommes qui la composaient semblaient presser le pas. On les voyait à distance courir aussi vite que pouvait le leur permettre la largeur des raquettes dont ils étaient chaussés. Ils n’avaient avec eux qu’un seul traîneau et quelques chiens. Il devint promptement manifeste aux yeux des gens de l’Étoile Polaire que leurs compagnons essayaient de se soustraire à un danger imminent.

Bientôt on n’eut plus de doutes à cet égard.

Les premiers qui rejoignirent la colonne s’empressèrent d’expliquer les motifs de leur fuite.

Ils avaient à peine parcouru 6 à 7 kilomètres à partir du cap Washington que les chiens avaient donné des signes non équivoques de terreur. Surpris à bon droit, les matelots s’étaient massés autour des traîneaux, et quelle n’avait pas été leur désagréable surprise en apercevant, à quelque cent mètres de leur route, deux ours de taille gigantesque. Contrairement à leurs habitudes de lâcheté, les redoutables plantigrades n’avaient pas battu en retraite. Mais les coups de feu de la troupe les avaient écartés.

Cette première rencontre était presque oubliée, lorsque, au bout de 10 nouveaux kilomètres, trois autres ours s’étaient montrés. Ceux-ci avaient paru moins hardis, mais plus tenaces que leurs devanciers, et ils avaient suivi la troupe, bien qu’à une distance respectueuse, jusqu’au lieu de son campement.

La nuit que les pauvres matelots avaient dû passer sur la glace avait été hantée de terribles cauchemars.

Par bonheur, les farouches compagnons de leur route avaient maintenu leur distance. Une prudence innée les avait fait se méfier du voisinage des armes à fou.