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de neige dont on avait redouté la violence ne dura pas, fort heureusement, et l’on atteignit ainsi le 1er septembre.

Il fallut alors tenir conseil. La saison était si avancée que toute tentative pour aller au delà paraissait devoir être abandonnée. Mais avec la santé, l’énergie et la volonté revenaient à M. de Kéralio. Il raconta à son tour toute l’histoire de son aventure.

« Oui, dit-il, j’ai vu le pôle. Il s’en est fallu de peu que j’y parvinsse. Cette muraille de glace qui se dresse devant nous n’est pas de la même composition que les blocs paléocrysliques sur lesquels nous reposons en ce moment. Elle n’a point de contact avec la mer.

— En effet, se récria d’Ermont, M. Pol et moi, nous avons pu le constater d’une manière précise. Elle repose sur une console dérochés épaisses et dures, dont le pied plonge à des profondeurs énormes de l’océan. Toutefois rien n’autorise à croire qu’il n’existe point de failles, de fissures dans ce soubassement, quelque chose comme des tunnels, des passages sous-marins.

— Ces passages existent, mon cher enfant, et je ne puis mieux vous l’affirmer qu’en vous répétant ce que j’ai écrit dans le document que vous a livré ma bouteille. Ils existent. Nous y sommes passés. Mais parvenus de l’autre côté de cette ceinture granitique, nous avons été repoussés par une force invincible, par une sorte de remous prodigieux qui nous a rejetés en dehors de la périphérie, et n’eût été l’obligation de revenir en arrière, nous aurions tout tenté pour vaincre cette force centrifuge.

— L’obligation, dites-vous ? questionna Isabelle.

— La nécessité, absolue, implacable. Et, précisément, vous