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d’une de ces huttes dont on retrouve encore des vestiges dans les régions les plus septentrionales du Groenland : et de la terre de Grinnell. Mais ici aucun doute n’eût été permis, alors même qu’on n’aurait pas reconnu le bateau sous-marin. Les Esquimaux sont des sauvages de trop de sens pour construire leur demeure sur un terrain aussi peu stable que la surface glacée de l’océan.

Hubert bondit sur les blocs branlants qui dominaient le bateau enlisé et pénétra le premier dans l’intérieur. Un spectacle navrant l’y attendait.

Isabelle, aussi pâle qu’une trépassée, était agenouillée auprès d’une créature humaine dont l’apparence était celle d’un cadavre. De temps à autre, elle versait sur les lèvres serrées et bleuies du malheureux quelques gouttes d’eau-de-vie, contrainte d’écarter elle-même les lèvres et de desserrer les dents du moribond.

« Hubert, dit-elle rapidement, celui-ci est mon père. Il vit encore. Ses deux compagnons sont morts. Vous retrouverez leurs corps à côté, près de la machine. C’est le froid qui les a tués. Ils n’avaient plus de combustible, et leurs provisions étaient gelées. »

Le docteur Servant s’était empressé auprès de M. de Kéralio.

« Capitaine, dit-il, il est urgent que l’un de nous se détache pour aller chercher du renfort. Nous ne pouvons laisser ici Mlle Isabelle et son père, et cette température est absolument insoutenable. »

D’Ermont hésitait. Il objecta que sa présence pouvait être utile sur les lieux.

Ce fut encore Guerbraz qui eut l’illumination de génie nécessaire à cette situation critique.