Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/252

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Oh ! mon Dieu ! pleura d’Ermont, elle est morte !

— Du courage, capitaine, prononça l’énergique Guerbraz, et en avant ! »

Pour la seconde fois, la plainte désolée du chien traversa l’air.

« Salvator ne gémirait pas ainsi, fit Hubert, si Isabelle était vivante.

— Il ne faut jamais désespérer », dit à son tour le docteur, qui doubla le pas.

Et Guerbraz, comme pour s’entraîner lui-même, jeta une robuste clameur :

« Tiens bon, Salvator, tiens bon ! On y va ! »

Maintenant les rafales, courant dû sud-ouest, emportaient leurs voix. En même temps, d’épais flocons les souffletaient, le tapis de neige s’amoncelait sous leurs pieds. Par bonheur le froid terrible qui régnait, un froid de 42 degrés au-dessous de zéro, durcissait ce tapis sous leurs pas. Ils ne couraient pas, ils volaient.

Enfin, il leur parut que les aboiements du chien se rapprochaient.

Oui ils se rapprochaient. La vaillante bête avait flairé les émanations des trois hommes, et, au lieu de la plainte lugubre de tout à l’heure, c’étaient de sonores aboiements d’appel qu’elle jetait à plein gosier.

Guerbraz l’aperçut le premier.

Salvator était accroupi devant un énorme hummock de 10 mètres au moins de hauteur. Ce monticule était fait de quartiers géants, conglomérés entre eux par un ciment de neige fraîche. De seconde en seconde, ce mortier d’un nouveau genre s’épaississait, malgré les efforts désespérés du chien