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la brume. Elle s’étendait à perte de vue dans le sud, l’est et l’ouest, mais, au nord, ses vagues venaient briser contre une infranchissable barrière de glaces.

Tout s’expliquait. De puissants courants magnétiques, déterminés peut-être par la rotation de la Terre, rendaient inaccessibles les hautes couches de l’air. Les directions des souffles glacés dont les savants ont constaté la tendance vers l’équateur ne sont pas autre chose que l’infléchissement des mêmes souffles venus de l’équateur et s’arrêtant au pied de la ceinture glaciaire. Tout laissait à supposer que, par delà cette muraille infranchissable, l’atmosphère va s’abaissant de plus en plus et diminuant d’épaisseur, amoindrie par la force centrifuge.

Schnecker, en constatant le peu de distance qui séparait la nacelle des flots, crut à une chute.

« Nous sommes perdus ! » s’écria-t-il avec effroi. Hubert n’était point rassuré.

« Il y a des chances, murmura-t-il, pour que nous ne sortions plus de la zone de rotation. Rien ne nous assure que nous n’allons pas faire ainsi le tour du 88e degré, en passant au nord de l’Amérique, du Kamtchatka, de la Sibérie, de la Russie et de la Suède.

La crainte était fondée. Il était manifeste que le ballon, emporté par ; un mouvement tangent à la circonférence de l’énorme glacier, allait tourner avec la Terre autour de cet axe idéal qui se termine aux pôles, si quelque interruption du courant magnétique ne venait point interrompre cette rotation. Ce fut, heureusement, ce qui se produisit.

Brusquement une commotion eut lieu. L’aérostat se coucha littéralement sur un lit de fluide, et les aéronautes durent