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Le docteur Servan fit même de ce repos une véritable obligation.

Puis, Isabelle de Kéralio, dévorée par l’inquiétude, vint, avec larmes, supplier Hubert de lui raconter ce qui s’était passé depuis le jour de la séparation.

Le récit du lieutenant de vaisseau fut émouvant.

Au départ, la colonne, animée par un espoir immense, avait surmonté rapidement, mais non sans quelques efforts, les premières difficultés du traînage. La glace était solide et adhérente au rivage de l’île Courbet, bien que couverte de hummocks et hérissée sur plusieurs points d’arêtes vives et tranchantes projetées au-dessus du champ par la poussée continue des marées et des courants.

Grand avait été le désappointement en reconnaissant le peu d’étendue de l’île vers le nord.

Mais on s’était promptement consolé par la pensée que le pack serait encore assez résistant pour permettre de gagner les terres qu’on apercevait plus loin, à une distance qu’on évalua à peu près à vingt milles. Aussi, après s’être accordé vingt-quatre heures de répit, la colonne avait-elle repris sa course aventureuse sur l’icefield.

Le 25 juin, on avait atteint cette terre, objet de toutes les convoitises et de toutes les espérances. Elle était assurément beaucoup plus étendue que l’île Courbet, mais n’était, au demeurant, qu’une île se développant en largeur de 86° à 86° 23’, soit sur une largeur de 38 kilomètres.

Au delà, le pack reprenait son empire, mais à des signes non équivoques, tels que boursouflures géantes, glaces bleues immaculées, on pouvait reconnaître la présence de terres fragmentaires, d’îlots rocheux continuant fort avant dans l’océan