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constamment entretenue, le sable azoté clés plates-bandes avait produit autant qu’une terre riche des zones tempérées. On récolta quelque quatre-vingts ou cent carottes, trente bottes de radis, que les matelots déclarèrent d’une saveur exquise, une dizaine de bottes de cresson de terre, et plus de cent quarante pieds de salades diverses, laitue, romaine, mâche ou chicorée.

Le chapitre des fruits fut moins abondant. Il fournit à peine deux saladiers de fraises, dont la fadeur causa quelque désappointement. Mais, le sucre et le rhum aidant, on finit par les déclarer miraculeuses. Enfin Isabelle put faire, outre un bouquet pour elle-même, une cueillette de fleurs suffisante pour en orner toutes les boutonnières, et ce fut avec cette décoration d’un nouveau genre que valides et invalides assistèrent au banquet du départ donné à bord du steamer. De longues et joyeuses acclamations fêtèrent l’héroïne devenue la fée protectrice en même, temps que la sœur de charité de l’expédition.

Après quoi l’on se sépara, non sans une profonde émotion.

Le commandant Lacrosse gardait à son bord le personnel strictement nécessaire à la manœuvre du navire. Il y gardait aussi les blessés et les malades, et leur présence décida Isabelle à y demeurer, en compagnie de sa fidèle nourrice, pour leur assurer des soins vigilants et entendus. Le docteur Servan, de son côté, céda, quoique à regret, à son collègue Le Sieur sa place dans la colonne qui allait suivre la route de terre.

D’ailleurs il demeurait convenu que cette colonne longerait la côte, parallèlement à la marche du navire, et que l’on se tiendrait, autant que possible, en communications constantes.

Le 20 avril, à la suite d’un fort coup de vent de sud, le ciel apparut purifié des nuages gris qui le déshonoraient, et le