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VAN : LES JARDINS — LES HOMMES, ETC.

faveur — exception n’est pas le mot, c’est une interprétation casuistique qu’il faut dire — il nous servit du vin doux ; n’étant pas encore fermenté, ce n’était pas du vin — le principe était sauf !

Les difficultés que nous rencontrions à Van étaient pour nous toujours un ennui, parfois un danger ; mais nous pouvions du moins, ne sachant souvent comment employer nos loisirs forcés, faire des visites ; nous avons ainsi appris bien des détails sur les hommes et les choses. Les moindres ruelles des jardins nous sont devenues familières, et nous gardons le souvenir de plus d’un intérieur qui s’est aimablement ouvert pour nous.

Le lecteur a vu comment les Turcs agissaient envers nous ; aussi n’aura-t-il, je pense, pas de peine à croire que le dessous des cartes de l’administration ottomane réserve souvent d’édifiants spectacles.

Ce qu’on appelle le « Vieux Turc » forme une catégorie assez sympathique. Elle est composée de Musulmans croyants, généralement ignorants, quelquefois intolérants, franchement routiniers, mais loyaux et ayant un vrai sentiment de la justice ; leur amitié est difficile à obtenir, mais elle est sûre. Cette catégorie d’hommes est fortement représentée parmi le peuple ; dans le monde des employés le vieux Turc se fait rare ; il est évincé par la Jeune Turquie.

La Jeune Turquie, sur laquelle reposaient au début tant d’espérances, est le dernier produit de l’Islamisme mis en contact avec la civilisation.

Nos sociétés chrétiennes peuvent aujourd’hui encore supporter leurs vices, à cause de l’influence latente que le Christianisme conserve sur ceux mêmes d’entre nous qui en semblent le plus éloignés ; à cause surtout de la marque profonde qu’il a imprimée sur toutes nos institutions sociales. Quand des nations qui sont en dehors du Christianisme se trouvent en contact avec notre civilisation, elles n’aperçoivent pas l’élément caché qui la fait vivre et durer ; elles n’en voient que l’écorce, et elles n’en prennent que l’écorce, c’est-à-dire les vices.