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CHAPITRE XIII

Presque toutes les villes d’Orient que nous avons visitées sont rigoureusement délimitées par leurs remparts. Ceux-ci ont beau tomber en ruines : ils forment encore une barrière généralement respectée et que les brigands ne franchissent point à l’ordinaire dans leurs expéditions de pillage. À l’abri de ses remparts, le citadin ne se trouve aux prises qu’avec le gouvernement et ses employés ; engeance qui pourrait, il est vrai, faire regretter les brigands.

Autour des remparts s’étendent des vergers ; leurs cultures arrivent parfois à maturité, sans que les pillards aient prélevé une trop forte dîme ; mais ces vergers sont rarement habités ; des razzias y sont trop à craindre.

Ici il en est autrement.

La forteresse de Van est un rocher isolé au milieu de la plaine, un excellent donjon naturel d’où l’on peut surveiller tous les environs ; il suffit donc d’une petite garnison pour défendre la banlieue. La population vanliote, composée en majeure partie d’Arméniens, gens intelligents, actifs, souvent riches, a mis à profit cette situation.

Confiant aux remparts de la ville le soin d’abriter dans des ruelles tortueuses les bazars où s’entassent leurs marchandises, les Vanliotes se sont plu à bâtir leurs demeures dans la campagne où ils trouvaient l’air et l’espace. Ainsi se sont peu à peu formés les « jardins ». Les avenues en étaient toutes tracées par les vieux sentiers qui des différents points de la plaine aboutissaient aux portes de la ville, et quelques petits hameaux formaient comme les centres de rayonnement de ces nouveaux quartiers.

Enserrés dans des ruelles étroites à l’intérieur de leurs remparts, les Vanliotes ont par une réaction naturelle donné aux avenues des jardins une grande largeur. De nombreuses sources étaient à leur disposition ; ils les ont utilisées pour l’irrigation, et partout l’on voit couler sur les côtés des avenues, des ruisseaux d’eau vive dont les bords sont plantés de rangées de saules ou de peupliers. Parfois l’avenue compte de quatre à six rangées d’arbres.