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CHAPITRE XI

notre direction étant le Nord, tandis que le Néhil-Tchaï tire à l’Ouest pour rejoindre le Zab à travers des gorges impraticables, nous devons quitter la vallée du Néhil, pour couper au plus court par les sommets. Vers 11 heures nous franchissons un affluent du Zab, pittoresquement encaissé et bordé d’arbres ; les zabtiés ne veulent pas s’y arrêter, de peur des brigands. Une nouvelle grimpade nous mène sur un long plateau ; quoique nous soyons déjà en Octobre, étant donnée la grande altitude où nous nous trouvons, les habitants commencent à peine la moisson. Au dire de nos zabtiés, un combat sanglant a eu lieu ici, il y a quelques jours, entre les brigands et les habitants du village voisin ?

Nous descendons enfin dans une vallée assez large, pour faire halte au-dessous du village de Bovis, près d’une source d’eau médiocre ; il est près de deux heures, et nous sommes affamés.

Bovis n’est qu’à une demi-heure du Grand Zab. Nous retrouvons de nouveau ici le cachet des hauts plateaux ; en amont, c’est-à-dire au Nord de Bovis, le pays porte le nom d’Albâg ; la vallée est large ; les hauteurs qui la bordent, ressemblent plutôt à de hautes collines qu’à des montagnes ; le Zab y coule lentement en décrivant les plus curieux méandres qui rappellent absolument en miniature ceux de la Theiss. Vers le Sud, au contraire, le contraste est frappant ; le Zab s’engage dans d’étroits défilés ; les montagnes prennent les formes les plus fantastiques ; elles se dégagent à de grandes hauteurs au-dessus de la vallée où la rivière se précipite en rapides successifs. C’est là le pays de Djoulamérik, la citadelle du Kurdistan ; les chemins y sont d’étroits sentiers, souvent construits avec des poutres surplombant l’abîme ; c’est le pays des Kurdes les plus braves et des Nestoriens qui ne le leur cèdent pas en fierté et en esprit d’indépendance[1].

  1. Le grand Zab prend sa source dans l’Albâg par 38°,25 de latitude à une altitude de 2 286 mètres (Ritter’s Erdkunde, ix, 641. — L’altitude indiquée doit, à mon sens, être trop faible (d’au moins 2 300 mètres) et se jette dans le Tigre à 50 kilomètres au-dessous de Môsoul, exactement sur le 36e parallèle, à une altitude de 150 mètres environ. Sa direction générale est du Nord au Sud ; son cours est toutefois plus long que ces données ne pourraient le faire supposer. En l’estimant à 450 kilomètres on sera, je crois, plutôt au-dessous de la vérité. En acceptant ce chiffre de