paient avec leurs dentelures étranges les chaînes de montagnes du Karabagh ; sur la rive droite de l’Araxe, le Nicham.
Les contreforts dénudés de ces montagnes, les unes volcaniques, les autres composées d’un grès rouge-sang[1], offrent déjà pendant le jour les teintes de roches les plus vives, du rouge intense au vert et au violet ; mais une lumière trop éclatante leur fait tort. Au coucher du soleil toutes ces teintes prennent une harmonie et une chaleur de tons ravissantes : feu de Bengale inimitable dont la nature fait les frais ! Dans la campagne tout est silence ; de longues files de chameaux parcourent seules la plaine pour gagner un campement ; au loin l’on entend le cri du Muezzin qui appelle à la prière les fidèles du Prophète ; peu à peu tout se tait : l’un après l’autre les hauts sommets, irisés des dernières lueurs du jour, entrent dans l’ombre, et à ce spectacle succèdent les poétiques splendeurs d’une nuit d’Orient.
Comme la plupart des voyageurs se rendent directement de Nakhitchévan à Khoï, sans passer par Djoulfa, il nous est difficile d’organiser notre caravane, et nous attendons vainement des chevaux pendant toute cette journée.
Notre temps se passe à repousser les importunités du maître de poste, propriétaire ou gérant du khân ; il est ivre-mort et se traîne constamment jusqu’à notre chambre prétendant nous confisquer notre bagage ! Il est curieux de voir avec quel respect les domestiques traitent cette vieille brute.
- ↑ Pour la géologie des environs de Djoulfa voir Dubois de Montp. Atlas. Série v, planche 7. E. Reclus, Géog. vi, 256, nomme en détail la plupart des sommets du Karabagh.