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dit-il. »

Camille Bias s’arrête un moment à ce souvenir qui la reporte à l’époque heureuse de sa vie, mais qui lui rappelle aussi, hélas ! les tristesses actuelles.

La petite fille qui souffleta si gentiment Blanqui est aujourd’hui veuve avec quatre enfants dont l’existence repose sur le courage de la mère et de la grand’mère…

Émile de Girardin

Insensiblement, nous sommes revenus à notre point de départ…

— Je n’ai pas d’histoire, me dit-elle, malgré mon demi-cent de romans. Je n’ai commencé à écrire que très tard, quand, mon mari mort, il m’a fallu travailler pour assurer l’existence de toute ma famille. Il n’y a rien dans ma vie qui puisse intéresser la curiosité — sauf mes débuts, peut-être, chez Émile de Girardin.

« D’une timidité excessive, je n’osais pas me présenter. Enfin, sur la recommandation d’une amie, je m’enhardis à porter à Émile de Girardin mon roman, le Roi des Taverniers. Mon amie me présenta de cette façon originale :

» — Je vous présente Camille Bias, la plus grande imbécile que j’aie jamais connue.

Émile de Girardin demanda de son air bourru qui m’épouvanta :

» — Comment cela ?

» — Elle n’osait pas vous rendre une visite qu’elle vous doit pourtant.

» Girardin me regarda et me dit brutale-