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MONSIEUR AUGUSTE

pour la signature du contrat, et qu’aucun éclat ne serait donné à cette union. Quelques parents, le colonel de Gérenty et sa belle-sœur, deux amis intimes devaient suffire à une fête de famille ; et trois jours après le mariage, les mariés, accompagnés de M. Lebreton, d’Agnès et de Rose, devaient partir pour l’Italie et faire un voyage d’un an.

Octave a consenti à tout : il n’appartient plus à la terre depuis le moment où M. Lebreton lui a dit deux fois, pour les lui rendre croyables, ces mots sublimes :

— Je vous donne ma fille.

La terre est pour lui un grain de sable, créé pour soutenir son pied dans le voyage de l’infini ; il ne voit rien, n’entend rien, ne comprend rien ; il habite une région d’azur, de lumière, de mélodie, où l’amour est le seul sentiment, où la beauté de Louise est le seul objet digne de ses regards. Il compte les minutes par les battements de son cœur ; les pendules n’ont plus de cadrans, les horloges ont perdu la voix ; tout est muet et invisible ; rien n’existe, rien n’est vivant autour de lui. Parfois, il s’oublie lui-même ; il ne se sent plus vivre, il a donné son âme ; il revit dans ce corps divin qui lui appartient, et quand la fièvre des sens le rappelle à la réalité humaine, au dénoûment qui se prépare, à