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MONSIEUR AUGUSTE

dans une maison, quand on a les domestiques pour soi. Monsieur Octave, il ne reste plus que moi de malheureux. Le soleil se couche, et se lèvera demain, aussi brillant que vous. Je vais voyager aux étoiles avec plaisir, car vous ne souffrirez pas de la jalousie de la nuit. Me permettez-vous de vous dire adieu, sans vous serrer la main ?

Octave ressuscitait par secousses, et n’osait douter, car la parole de Simaï portait la vérité avec elle.

— Voici pour votre ermitage du val di Nota, dit-il, en donnant son portefeuille à Simaï ; et si vous me promettez une dernière fois, devant ce soleil qui se couche, de vivre honorablement, je vous permets de me serrer la main.

— Simaï poussa un cri de joie et serra la main d’Octave, en disant :

— Cette main d’honnête homme m’a guéri !… adieu.

Octave suivit quelque temps des yeux ce personnage étrange qui venait de jouer dans sa vie un rôle si court et si décisif. Le malheureux avait reçu l’argent avec une sorte d’indifférence, ayant plutôt l’air d’obliger le bienfaiteur que d’être obligé lui-même et donnant ainsi un certain crédit au dicton : L’argent ne fait pas le bonheur.