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MONSIEUR AUGUSTE

promet rien, et on vous croit profond ; mais n’allez jamais plus loin. J’ai appris cela en fréquentant les chancelleries. Les Turcs sont les premiers diplomates du monde : ils dorment toujours, surtout en fumant ; et lorsqu’ils sont obligés de répondre ils se taisent, inclinent la tête en arrière, poussent une aspiration gutturale, et lèvent les yeux au ciel. Je vous recommande ce genre de réponse. À Malte, tout le monde répond ainsi. Cette diplomatie irrite parfois le Malta-Times, et finira par chasser les Anglais de l’île. M. de Talleyrand n’a, dit-on, réussi qu’avec ce procédé, seulement il ne regardait pas le ciel.

M. Lebreton attendait avec impatience la fin de cette leçon pour partir ; il lui tardait de voir la contenance d’Auguste dans une première rencontre, et il se proposait bien de ne pas suivre une diplomatie dont la gravité fausse était assaisonnée de trop de plaisanteries légères. Il prit donc congé de Mme de Gérenty, et la désolation était peinte sur tous ses traits. L’homme heureux avait rencontré un chagrin, et il s’étonnait de cet accident injuste.

— Messieurs, dit Mme de Gérenty, à son beau-frère et Octave, vous pouvez maintenant vous rapprocher ; vous n’êtes plus de trop ; cet excellent voisin est désolé ; je comprends sa douleur, mais