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MONSIEUR AUGUSTE

fut pour elle, et voici la suprême faveur que je vous demande. Vous entrerez aujourd’hui dans mon atelier, après votre visite à mon père ; vous trouverez un tableau couvert sur mon chevalet ; vous l’apporterez ici et vous le jetterez dans le puits… C’est son portrait en pied, et… vous ne le regarderez pas… Oh ! vous ne le regarderez pas… Vous jurez de ne pas le regarder… Jamais fille de seize ans n’a été plus belle ! Adieu Louise ! je meurs pour toi !

Il allait consommer le sacrifice. Le colonel poussa un cri et l’arrêta.

— Que dites-vous ? que dites-vous ?

— Je dis la vérité, comme tout homme qui va paraître devant Dieu. Soyez heureux avec elle ; épousez-la.

— Épouser !… qui ? ma belle-sœur ! Voyons… tout ceci n’est pas clair… expliquons-nous… C’est bien vous que j’ai gravement insulté, hier soir, dans l’allée des tilleuls ?

— Moi, colonel !… Vous ne m’avez jamais insulté gravement, jamais.

— Quand vous sortiez de la maison de…

Il acheva très-bas à l’oreille :

— De Mme de Gérenty.

— Je jure sur l’honneur que je n’ai jamais mis le pied dans la maison de cette noble femme… Ah ! j’y