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MONSIEUR AUGUSTE

Pile ou face ! Si vous devinez, je me précipite, tête première, dans ce gouffre sans fond ; si vous ne devinez pas… Acceptez-vous ?…

Une légère teinte de pâleur courut sur la figure du colonel.

Puis, il essaya de sourire, et dit :

— Votre arme est un paradoxe, une arme absurde !

— Ah ! c’est un paradoxe, s’écria Octave d’une voix stridente ; ah ! c’est une arme absurde, monsieur ! L’arme absurde est celle que j’aurais prise pour me faire tuer avec une pointe d’acier ou avec une balle de plomb, par un duelliste, docteur in utroque. Tout ce qui tue est une arme ! Tout ce qui montre le courage d’un homme est un honneur ! Toute fuite devant un péril est une lâcheté. Colonel, si vous n’acceptez pas cette arme d’un bourgeois, je vais publier partout que vous êtes un poltron.

Les deux hussards serrèrent la main du jeune homme, et firent des signes d’approbation.

— Lancez la pièce de cinq francs, dit le colonel d’un ton résolu.

— Colonel, je vous rends toute mon estime, dit Octave, et je rétracte tout ce que j’ai dit.

— Témoins, vous entendez ! dit le colonel.

— Nous sommes donc tous les deux à l’article de la mort, reprit Octave… Colonel, si je succombe