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MONSIEUR AUGUSTE

— Colonel, dit Octave sur un ton léger, je suis peintre de mon état, je manie le pinceau… Que diriez-vous, si je vous proposais un duel dans lequel nous serions obligés, tous les deux, de dessiner cet arbre que voilà, et de déclarer vainqueur celui qui se tirerait le mieux de ce travail ?

— Jeune homme, dit le colonel, je vous prie de parler sérieusement. Nous ne sommes pas ici pour échanger des fadaises… ou bien…

— Puisque vous ne voulez pas répondre à ma question, dit Octave, je vais répondre, moi… L’épée, le pistolet, le sabre, sont les outils de votre profession. Ma main ne les connaît pas ; elle a perdu son temps à s’exercer sur le pinceau.

Les hussards donnaient de violents signes d’impatience.

— Un instant, mes camarades, dit Octave.

— Il va proposer un duel au pinceau ! dit un témoin en riant.

— Colonel, reprit Octave, vous n’avez pas un grand mérite à vous servir des armes que vous connaissez si bien contre un jeune homme qui ne les connaît pas. Vous ne voulez point m’assassiner, n’est-ce pas ?

— Monsieur, dit le colonel, un duel peut toujours s’égaliser.