En ce moment un officier, attaché à la maison du gouverneur, monta l’échelle et demanda la veuve Lilia d’Elbonza. Le beau-père tressaillit de joie, et conduisit l’ambassadeur vers sa belle-fille ; se doutant bien du message.
L’ouragan commençait ; des gouttes d’eau, larges comme des piastres d’Espagne, tombaient en se gonflant sur la mer, et annonçaient un déluge ; des crevasses livides se dessinaient à l’horizon, en versant des éclairs prodigieux, et des tonnerres sourds semblaient essayer leurs forces à la voûte du ciel, comme un orchestre qui prélude avant l’explosion de ses instruments.
— Nous sommes perdus ! murmurèrent en chœur les matelots, et le capitaine ne les rassura point.
— Madame, dit l’officier à Lilia, Son Excellence le très-haut et très-puissant seigneur, gouverneur de la Havane, m’envoie vers vous, malgré ma profonde indignité, pour vous ramener à terre sur une bonne chaloupe et vous éviter les horreurs inévitables du plus terrible des ouragans.
— Oh ! cet excellent gouverneur ! — s’écria le beau-père au comble de la joie. — Allons, levez-vous, chère Lilia, et allons remercier ce digne gouverneur ! Béni soit Dieu ! nous sommes sauvés ! Il était temps ! Et le beau-père tendit la main à sa belle-fille qui ne tendit pas la sienne.
— Est-ce que Son Excellence, demanda Lilia, n’a rien ajouté de plus ?
— Ah il y a une chose que j’oubliais, Madame, dit l’officier, voici une feuille de papier au bas de laquelle votre belle main daignera apposer sa signature.
— C’est très-juste ! dit le beau-père, nous allons signer.