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semblait donner un adoucissement vague à mon désespoir : cela me suffisait. Concevez-vous, sir Edward, la joie immense qui a rafraîchi mon cœur lorsque le colonel nous a annoncé son mariage avec la fille du nabab ? On ne meurt pas de joie, je vis… maintenant, mon destin change. Ce Bengale s’écroule sous mes pieds ; il faut que je parte, sir Edward : mon âme est bien loin d’ici ; il faut que mon corps se lève pour la chercher.

— Comte Élona, dit Edward, dans votre discours, il faut que je devine la seule chose que vous avez oubliée.

— J’ai foi en votre intelligence, sir Edward.

— Vous aimez la jeune Grecque Amalia ?… Votre silence répond… et sans doute Amalia vous aime ?… Bien ! je garderai le silence à mon tour… Enfin tous ces mystères d’Europe et d’Asie commencent à s’éclaircir… Un fils de la malheureuse Pologne, une fille de la malheureuse Grèce, deux orphelins de deux illustres guerres !… C’était un amour inévitable et fort naturel… il n’y a que les diplomates qui arrangent des mariages impossibles… L’amour est plus intelligent que lord Palmerston, quoique le noble lord se soit surnommé Cupido… Eh bien ! mon cher comte, que puis-je faire pour vous ?

— Il faut, sir Edward, vous qui êtes plus Indien que Brama…

— Bravo ! comte Élona, vous avez les plaisanteries du convalescent… Achevez…

— Il faut que vous me trouviez un vaisseau pour mon retour.

— Je vous trouverai une flotte… mais avant tout, comte oublieux, il faut assister au mariage du colonel… Vous êtes invité officiellement…