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Le serpent est stupide comme un naturaliste du siècle dernier. »

Cette dissertation zoologique fut interrompue par la brusque arrivée du colonel Douglas. Il descendit l’escalier du chattiram, le visage rayonnant de joie, et serrant les mains d’Edward et du comte Élona.

« Messieurs, leur dit-il, je vous invite à signer mon contrat de mariage. Le nabab vient de fixer lui-même le jour de la cérémonie : j’épouse miss Arinda d’aujourd’hui à vingt jours, au village anglais de Boudjah. »

Un éclair de joie surhumaine éclaira le front du comte Élona. Il semblait que ce jeune homme, toujours silencieux et sombre, ressuscitait d’entre les morts. Personne ne remarqua cette transformation.

« Colonel Douglas, dit Edward exalté, cette nouvelle me comble de joie. Il me semble que je me marie. Mon système triomphe. L’Occident épouse l’Orient ; le vieux sang de la vieille Angleterre va se rajeunir au cœur du Bengale. L’intelligence et la force humaine ne périront pas… Voilà un bel exemple à suivre, comte Élona Brodzinski. Vous êtes jeune, grand, robuste ; nous vous trouverons quelque fille de nabab… Eh ! vous avez assez pleuré sur les malheurs de Varsovie ! Dieu sait pourquoi il fait tomber les villes, et le czar ne le sait pas. Le reflux de l’océan humain commence. Le Nord s’ennuie d’être Nord. Nous rentrons au berceau du soleil, qui est notre berceau. À cette heure le canon de la France troue l’Atlas ; les colons américains de la baie d’Agoa, et les nouveaux planteurs français de l’Afrique, bientôt se rencontreront, la charrue à la main, sous des zones inconnues, et s’embrasseront dans un hyménée de géants. Un jour on verra quelle puissante et nouvelle race d’hommes