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ardentes avec la neige des cotonniers bengalis. Une pluie de lumière semblait inonder cette création immense et la faire tressaillir sous des caresses de feu. C’était le Bengale dans tout son éclat dévorant, avec son grand soleil qui donne la langueur de la force, qui tue et ressuscite, verse l’amour au cœur de l’homme, et le diamant au cœur de ses monts.

La jeune fille du nabab, à demi couchée sur la natte du chattiram, jouait avec des tulipes sauvages écloses dans les fentes du bois de santal, et les lançait par-dessus sa tête au nabab son père, qui fumait le houka non loin d’elle. Edward et le comte Élona herborisaient aux bords du lac. Une foule de serviteurs, indolents comme des maîtres, étaient échelonnés sur les marches du chattiram, et s’écoutaient vivre dans une somnolence voluptueuse, fille du ciel indien.

Le colonel Douglas, debout et appuyé contre un pilastre, engageait un entretien avec miss Arinda.

« Je crois, ma charmante Arinda, disait le colonel, que ces maudits Taugs vous ont donné de l’humeur.

— Colonel, disait Arinda, voulez-vous me faire un beau présent de noces ?

— Parlez, miss Arinda.

— Apportez-moi le vieux Sing dans une cage.

— Arinda, vous avez une idée fixe, vous ne rêvez que de ces bandits la nuit et le jour. Vraiment j’en suis jaloux ; prenez garde ! je me ferai Taug… Voici le cadeau de noces que je vous destine, belle Arinda ; je l’attends par le premier télinga qui doit nous apporter nos lettres de Bombay. C’est une garniture de perles pour vos beaux cheveux de soie. Il faut toujours choisir ce qu’il y a de plus indigent pour l’offrir à la plus riche. Cependant je suis obligé de rehausser la valeur de mon cadeau. C’est moi qui ai retiré ces perles du