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Et il s’avança vers le rivage d’un pas ferme et résolu.

Le fidèle Indien Nizam attendait sir Edward.

« Nizam, lui dit-il, le jeune comte Élona est-il à bord ?

— Oui, sir Edward ; vos ordres sont exécutés ; je lui ai donné votre cabine. Seulement, d’après l’avis du capitaine, le comte Élona ne pourra monter sur le pont qu’au milieu de la nuit, jusqu’à notre arrivée en Égypte ; il sera prisonnier dans sa cabine pendant le jour. J’aurai soin de lui.

— C’est bien, » dit Edward.

La comtesse Octavie était encore immobile à la place où l’avait laissée Edward. L’agitation convulsive de son corps annonçait un désespoir suprême. À l’éclat de ses yeux, au désordre de sa chevelure, à la majesté orageuse de son visage, à la pose superbe de ses bras nus, on aurait cru voir une jeune prêtresse d’Homère évoquant les mânes des héros sur les rivages de l’Hermus. Le grave tuteur d’Amalia vint distraire la comtesse Octavie de ses sombres méditations.

« Ah ! vous voilà, madame ! dit ce tuteur ; je vous trouve enfin… Eh bien ! tout s’est passé à merveille. Notre demoiselle a supporté la crise jusqu’au bout, avec un bon sens au-dessus de son âge. Au reste, il n’y a rien de perdu. Le banquier Lhéman nous doit douze mille livres sterling. Les intérêts d’Amalia sont sauvegardés.

— Voilà une belle fête ! dit la comtesse avec une voix de rêve étouffant. Monsieur le tuteur, je n’ai pas entendu un seul mot de ce que vous avez dit ; aussi je vous prie de ne pas répéter votre phrase. Donnez-moi votre bras et partons. Nous trouverons Amalia sur notre chemin. »