Page:Méry - La guerre du Nizam, Hachette, 1859.djvu/13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Pardon, monsieur Edgard ; probablement nous n’avons pas fini avec le comte Élona…

— Madame, dit le jeune Polonais, pourriez-vous m’affirmer que la caravane de Mételin traversera l’Hermus, cette nuit, là, de ce côté ?

— Cette nuit… attendez… nous sommes à la mi-juin… La caravane de Mételin passera dans trois jours. »

Le comte polonais fit un mouvement dont le sens était une énigme.

« Comte Élona, dit la comtesse, votre intention est-elle de vous engager dans une caravane ?

— Peut-être, madame.

— Rien ne vous y oblige ; c’est une fantaisie, n’est-ce pas ?

— Une fantaisie, comme vous dites, madame… Mais la caravane part trois jours trop tard. C’est malheureux.

— Oui, je conçois cette fantaisie… Il y a une idée là-dessous qui me plairait aussi : je vous comprends, monsieur le comte… On sort d’un bal délicieux, étourdissant, et on va se mêler à des dromadaires et des bohémiens, dans un désert. Cela me sourirait comme contraste… Que pensent de notre idée ces messieurs ?

— Je pense, moi, dit le jeune Edgard, qu’il y a quelque chose de mieux à faire au sortir d’un bal…

— C’est ?…

— C’est de rentrer dans un autre bal, madame.

— Et avec vous, madame ; je n’ajouterai que ces trois mots, dit Ernest de Lucy.

— M. le comte Élona n’est pas de votre avis, messieurs ; il ne vient au bal que pour accompagner sa carte d’invitation… »

Le comte fit un sourire triste. « Pourtant, ajouta la comtesse, il faut convenir que