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Don Juan. Tu seras toujours ma maîtresse et ma femme.

Il l’embrasse.

Madame de Coulanges. Ma résolution est prise, je n’en changerai pas.

Entre madame de Tourville.

Madame de Tourville. Dans les bras l’un de l’autre !… Enfin je suis contente ! Je vous avais bien dit qu’elle ne demandait pas mieux.

Don Juan. Élisa, laisse-nous un instant. Attends-moi dans mon appartement, je t’y suis.

Madame de Coulanges sort.

Madame de Tourville. Déjà vous vous tutoyez ? — Le général vous demande.

Don Juan. Je sais qui vous êtes, madame… si je le voulais, je vous ferais pendre. — Voulez-vous dix mille piastres pour rester ici, ou aller au diable, si vous voulez, à condition de ne jamais revoir votre fille, de ne jamais lui parler, de ne lui écrire jamais ?

Madame de Tourville. Monsieur… mais… ma chère fille.

Don Juan. Dix mille piastres… réfléchissez !

Madame de Tourville. Une mère si tendre…

Don Juan. Oui ou non ?

Madame de Tourville. J’accepte les piastres… mais il est pourtant bien dur pour une mère…

Don Juan. Rentrez chez vous. Ce soir vous les aurez. N’essayez pas de sortir, ou les sentinelles feront feu sur vous.

Madame de Tourville. Au moins permettez-moi, pour la dernière fois…

Don Juan. Sortez ! et ne m’échauffez pas la bile !

Madame de Tourville À part. La petite rusée !

Elle sort.

Le marquis entrant. Ma foi ! je me rends. Vivent les jolis garçons ! Madame de Tourville m’a dit la vérité. Voici la lettre du résident qui m’invite à dîner chez lui.

Don Juan. Douze balles dans la cervelle, voilà ce qu’il lui faut !

Le marquis. Je ne lui en destine pas davantage, je ferai arrêter ses estafiers, et son dîner finira tout autrement qu’il ne l’espère. Ce sera le dernier que nous ferons dans cette île. Le vent est favorable ; demain l’amiral anglais jettera l’ancre devant Nyborg. — Je m’assurerai des officiers alle-