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CERVANTES.

avec toute sa famille pour une sérénade donnée dans sa rue, et terminée par des coups d’épée. On n’ignore pas qu’à cette époque les amants, par respect pour l’honneur de leurs dames, avaient coutume d’interdire, l’épée à la main, aux passants, l’entrée de la rue où se donnait la sérénade. Un curieux s’étant approché un peu trop des musiciens, malgré le cri terrible de atras ! en arrière ! il fut tué sur place. Il n’y avait rien que de très-ordinaire dans l’aventure ; mais comme Cervantes était mal avec une dévote sa voisine, elle eut le crédit de le faire mettre en prison, d’où cependant ses amis le tirèrent bientôt.

Un intervalle de onze années s’écoula depuis sa dernière comédie jusqu’à la publication de son Don Quichotte, et il ne paraît pas que ce temps ait été consacré à d’autres travaux littéraires[1]. Les soins qu’il se donnait pour pourvoir à l’entretien de sa

  1. On a conservé cependant une épigramme à laquelle avait donné lieu certaine aventure ridicule arrivée à Séville, où il demeurait en 1598. Philippe II venait de mourir, et chaque ville s’efforçait à l’envi de se surpasser en magnificence, par les honneurs funèbres qu’on lui rendait. Séville lui avait élevé un catafalque magnifique dans la cathédrale, où toutes les autorités se rendirent pour assister au service funèbre. Il faut savoir que parmi tous les Espagnols, les Andalous sont renommés pour leur susceptibilité et leurs fanfaronnades. Au